C. L’expérience du « Libertaire » quotidien (1923-1925)

Après la perte de la direction de la C.G.T.U., l’idée d’une publication quotidienne du Libertaire va s’imposer à l’esprit des militants anarchistes comme le meilleur moyen de contrecarrer l’influence de L’Humanité dans les milieux ouvriers. Si le projet est ardemment défendu par l’équipe de rédaction, les fonds récoltés par des emprunts ou des souscriptions sont insuffisants. Pourtant, le lancement de la nouvelle formule est précipité pour profiter de la publicité faite au journal par la mort du jeune Philippe Daudet. Ce qui n’était au départ qu’un simple fait divers n’allait pas tarder à devenir une affaire politique à cause de la personnalité du père de la victime, Léon Daudet. Mais le feuilleton judiciaire qui suivit opposant l’U.A. à l’Action Française n’a pas permis d’assurer un volume de vente suffisant.

L’Union anarchiste devra bientôt se résoudre à mettre un terme à cette expérience faute de moyens financiers. Pourtant son bilan n’est pas totalement négatif. Le quotidien a regroupé dans une sorte d’oecuménisme politique des militants de tendances opposées : anarcho-syndicalistes, individualistes et communistes libertaires. A cette occasion Le Libertaire a même réussi à toucher un public élargi puisque les ventes dépassaient le chiffre de 11 000 exemplaires par jour ! Néanmoins il n’est jamais parvenu à devenir le journal ouvrier de référence comme l’ambitionnaient les initiateurs du projet. Jamais dans son histoire, Le Lib ne retrouvera une périodicité quotidienne. C’est une raison suffisante pour que nous étudions de plus près cette époque du titre.